«Le Libérateur» dans une copie restaurée en hommage posthume à Kaïs al-Zubaïdi, l’une des figures les plus emblématiques du cinéma documentaire arabe, ouvre la 35e édition des JCC.
Le long-métrage Le Libérateur (1987), œuvre poignante du réalisateur irakien Kais al-Zubaidi, qui nous a quittés le dimanche 1er décembre 2024, ouvre la 35e édition des Journées cinématographiques de Carthage (JCC), prévues du 14 au 21 décembre 2024. Ce film, qui documente les luttes des peuples palestinien et libanais contre l’entité sioniste, est un témoignage fort de l’engagement de son auteur.
L’annonce de cette projection en version restaurée, 37 ans après sa première projection en Tunisie, est bien plus qu’un simple hommage. C’est une manière de célébrer l’héritage cinématographique et humain de Kaïs al-Zubaïdi, un réalisateur, chercheur et monteur irakien, dont les œuvres ont marqué les esprits. Le comité directeur des JCC, profondément ému par la perte de ce pionnier du cinéma documentaire arabe, a voulu offrir à son film une nouvelle vie, à la hauteur de son impact.
Dans la section JCC Classiques, cette édition rendra hommage à de grands noms du cinéma arabe et africain, et il est évident que Kaïs al-Zubaïdi, avec ses créations intenses et visionnaires, y aura une place de choix. Son œuvre n’a cessé de mettre en lumière la cause palestinienne et les enjeux sociopolitiques du monde arabe. Parmi ses films les plus marquants, il y a aussi Loin du pays (1969), un court-métrage documentaire émouvant, projeté lors de la 33e édition des JCC en 2022 dans la section Focus Palestine.
C’est un moment de mémoire, mais aussi de réflexion sur l’impact que peuvent avoir des films porteurs d’une telle vérité et d’une telle humanité.
Né à Bagdad en 1945, Kaïs al-Zubaïdi a étudié à l’Institut supérieur du film de Babelsberg (Allemagne), où il obtient ses diplômes en montage (1964) et en image (1969). Il a travaillé pour le studio Defa, spécialisé dans le cinéma documentaire, et a également enseigné à l’Institut supérieur du cinéma en Allemagne. Au cours de sa carrière, il a exercé les fonctions de scénariste, réalisateur, chef opérateur, monteur, mais aussi de critique et théoricien du cinéma. Il a animé de nombreux ateliers sur l’écriture de scénarios, la réalisation et le montage, notamment à Tunis, ainsi qu’au sein d’institutions et de sociétés de production en Syrie et au Liban.
Kaïs al-Zubaïdi a réalisé plusieurs films documentaires pour l’Organisation nationale du cinéma en Syrie, mais aussi au Liban et en Allemagne. Ses œuvres ont été couronnées de nombreux prix dans des festivals prestigieux, tels que le Festival de Damas, le Festival Palestine à Bagdad, et les JCC de Carthage, entre autres. Parmi ses projets en Allemagne, il a travaillé à la fois en tant que réalisateur et monteur, tout en contribuant à des films arabes majeurs, tels que Une couronne d’épines (Nabil Al-Maleh), la trilogie Des hommes dans le soleil (Nabil Al-Maleh, Muhammad Chahine et Marwan Muazzin), La Vie quotidienne dans un village syrien et Sur la révolution (Omar Amiralay), Le Couteau (Khaled Hamadeh), Beyrouth, Ô Beyrouth (Marwan Bagdadi), Le Jour de la terre (Ghaleb Sha’ath), Retour à Haïfa (Qassem Hawal), et La Nuit (Muhammad Malas).
Au cours des années 70, Kais al-Zubaidi a été l’un des artisans d’un cinéma engagé, centré sur la résistance du peuple palestinien. Il est également reconnu comme l’un des initiateurs de l’Unité du cinéma Palestinien (PFU) au sein de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), un cinéma qualifié de «révolutionnaire palestinien ». Après le siège de Beyrouth en 1982, al-Zubaïdi a entrepris des recherches pour retrouver les films perdus de la PFU. Il en a découvert certains, qu’il a conservés dans une archive à Berlin, où il vivait.
Son film Palestine, A People’s Record (1984), qui témoigne de l’histoire révolutionnaire palestinienne, demeure une œuvre phare du cinéma militant, offrant une magistrale leçon d’histoire.
Son film «Le Libérateur» (Waheb Al Horriya) de 90 mn revient sur l’expulsion de la résistance palestinienne du Liban en 1982. Le documentaire s’appuie sur un matériel sonore et visuel comprenant des images photographiques rares et des scènes de films, associées à la musique et aux chansons de Marcel Khalife et de Ziad Rahbani.